Le viol d’un garçon de 13 ans par quatorze hommes bouleverse le Maroc
Le viol collectif d’un enfant lors d’une fête célèbre au Maroc a choqué le royaume chérifien en ce mois d’août. Une affaire qui a provoqué d’importantes réactions, les agressions sexuelles faisant déjà l’objet d’importants débats dans le pays. Plusieurs organisations demandent aux autorités de réagir et dénoncent un conservatisme ambiant qui empêche les réformes.
Début août, la ville de Moulay Abdellah Amghar, située sur la côte atlantique, organisait l’un des plus grands moussems du Maroc. Une fête traditionnelle qui, en l’occurrence, attire jusqu’à quatre millions de visiteurs.
Parmi les personnes présentes cette année figure un garçon de 13 ans, Bashir. Originaire d’une ville du sud du pays, Youssoufia, il est orphelin de son père et sa mère souffre de handicaps. Il doit donc se débrouiller seul pour gagner de l’argent. Habituellement, il vend des sacs et aide les voitures à se garer. Vu l’importance du moussem de Moulay Abdellah Amghar, il s’est rendu sur place.
C’est à cette occasion que Bashir aurait été drogué et violé par 14 jeunes hommes dans une tente, relèvent plusieurs médias marocains.
“Ce que nous avons vu à l’hôpital était très douloureux”
Bashir, qui a d’abord tenté de rejoindre Youssoufia, n’est examiné par des médecins que sur le chemin du retour, des personnes s’étant inquiétées de voir l’état de santé alarmant du jeune garçon. Il est hospitalisé à Marrakech et les examens médicaux confirment qu’il a été victime d’un viol. Bashir arrive néanmoins à décrire plusieurs de ses violeurs, ce qui a permis l’interpellation de cinq suspects, dont certains sont mineurs.
Plusieurs associations de défense des droits humains et des enfants se sont depuis mobilisées afin de défendre Bashir en se portant parties civiles ou en interpellant le gouvernement. Sur les réseaux sociaux marocains, un hashtag #AllForBashir a commencé à surgir. “Ce que nous avons vu à l’hôpital était très douloureux. Toute négligence ou tout retard dans le traitement de cette affaire sera interprété comme une trahison envers la victime, sa famille et la société dans son ensemble.”, explique au journal Yabibladi Hamid Raudi, coordinateur de l’Association marocaine des droits humains (AMDH) pour la région de Youssoufia.
Les violences sexuelles: un sujet polémique pour la société marocaine
Si le viol de Bashir provoque autant de réactions, c’est non seulement du fait de la gravité du crime, mais aussi parce que la société marocaine est notoirement touchée par la problématique des abus sexuels sur enfants, comme en attestent plusieurs études.
Le mariage des mineures fait en outre régulièrement l’objet de débats au Maroc. En théorie, l’âge légal du mariage est de 18 ans, mais des exceptions peuvent être autorisées. Fin 2024, mis sous pression par la société civile, le gouvernement a proposé de réformer la Moudawana – le Code de la famille – afin que ces exceptions ne soient plus accordées en dessous de 17 ans, contre 15 ans jusqu’ici.
Les associations dénoncent aussi plusieurs faiblesses dans le Code pénal marocain, note le magazine Telquel. Si son article 486 qualifie de viol une pénétration sexuelle commise sur une femme ou une mineure sans consentement, son article 485 considère que ce type d’agression sexuelle constitue un “attentat à la pudeur”, et non un viol, lorsqu’il concerne “des personnes de l’un ou de l’autre sexe”. Puisque Bashir est un garçon, son cas tombe dans le cadre de l’article 485, pointe Telquel.
Un conservatisme systémique
Ces failles juridiques sont régulièrement dénoncées par les associations de défense des droits humains, mais ces dernières font face à d’importantes résistances des milieux conservateurs, relève Libération.
L’islam étant religion d’État, chaque modification de la Moudawana doit être approuvée par des théologiens regroupés au sein du Conseil des oulémas. Ces religieux ont ainsi refusé plusieurs propositions de réforme touchant à ce sujet, sous prétexte que cela serait contraire à la charia. Ils ont par exemple rejeté la suppression totale de la polygamie dans le pays, en estimant que le Coran l’autorisait.
Un conservatisme qui se retrouve aussi au sein d’une partie de la population. Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a ainsi déploré dans un communiqué les commentaires sur les réseaux sociaux minimisant la gravité du viol subi par Bashir. L’organisation a en outre réitéré son appel à une redéfinition du viol afin d’inclure toutes les victimes, indépendamment de leur sexe.
Commentaires (1)
C'est un complot de Macky Sall...
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