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Jérusalem-Haïfa, le chemin des petits pas de la paix

Auteur: aps

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Un tronc de palmier sans racine ni feuillage trône parmi les sculptures exposées à l'entrée du Centre culturel judéo-arabe Beit Hage de Haïfa, une métropole balnéaire située à 131 km au nord-ouest de Jérusalem. L'œuvre d'art donne à la vue la fragilité des plans de paix entre Israéliens et Palestiniens."A sa réalisation, cet arbre déraciné et dénudé symbolisait les accords peu solides de 2001 pour dire qu'il restait encore beaucoup à faire pour arriver à la paix israélo-palestinienne entre les dirigeants au sommet, mais aussi avec les peuples à la base", explique Asaf Ron, Directeur exécutif dudit centre. Pour le compte du centre culturel, M. Ron, estime que la recherche de la paix n'est pas du seul ressort des politiques. 

Les hommes de culture aussi ont entre leurs mains une partie de la solution. Beit Hage organise des rencontres et échanges entre jeunes juifs et jeunes arabes. Financé par la municipalité de Haïfa, le complexe comporte trois bâtiments, dont le premier a été acheté et offert en donation par un juif américain. Il sert aussi de siège au Parlement des jeunes juifs et arabes. "Ce bâtiment classé dans le patrimoine historique de la ville de Haïfa est ouvert à tous les artistes. Il y en a qui disent qu'ils ne viendraient +pas cautionner une mascarade d'Israël+ en prenant part à nos expositions, conférences, ateliers, représentations, projections, performances et autres spectacles", signale le directeur. Dans les 118 provinces arabes, en majorité dans le nord du pays, les initiatives du genre se multiplient dans le but d'instaurer l'éducation à la paix à l'instar du Centre arabe de lutte contre la violence (AMAN), un acronyme signifiant le mot sécurité en langue arabe. 

Il est ouvert à l'intention des jeunes du village palestinien de Kfar Bara, sur la route de Haïfa. La présence israélienne est faite de caméras de surveillance pour garder un œil sur les habitants. Sans police ni armée, ceux-là ont d'autres soucis à se faire. L'absence de forces de sécurité est perçue telle une discrimination entre citoyens israéliens. Pire, elle profite aux délinquants, selon Amir Assi, ressortissant du village et icône arabe à Jérusalem. Feu son père était un membre fondateur du centre AMAN. "C'est ça le problème ici, mais nous assurons nous-mêmes notre propre sécurité pour juguler toute violence, même au sein de notre communauté", dit Sheikh Kamel Rayan, dirigeant et co-fondateur dudit centre.

 "Dans toutes les mosquées, indique-t-il, un centre de lutte contre la violence est attelé au lieu de culte." M. Rayan est aussi un membre de l'Association pour la protection et l'entretien du waqf islamique (biens sacrés). Cette organisation veille sur les lieux saints de l'islam en Israël. "Ce centre AMAN s'inscrit dans la promotion de relations pacifiques, mais toujours dans le respect des droits des musulmans que nous sommes", dit le Sheikh. Il a perdu lui-même un fils dans des violences. "Je n'ai pas voulu suivre la vendetta, j'ai préféré prêcher la paix des deux côtés. Il n'y a pas une famille qui n'ait pas une, deux ou trois victimes, des fois, le fils, le père ou la mère et cela ne peut continuer." ===SUIVRA=== Autre lieu, autre plan de paix. Dans la ville de Baqa Al Gharbiya, se trouve Sheikh Abdel Malik de la tarîqat Qasimiya, une confrérie sunnite et soufie fondée en 1880. "Nous n'avons pas d'agenda politique, notre doctrine vise à apurer les cœurs et les comportements et c'est cela l'héritage de nos valeureux anciens qui ont instauré la tarbiyât pour sauvegarder la rectitude. 

Avec les âmes, nous faisons comme les tôliers font avec les voitures", confie-t-il. La zawiya abrite le mausolée du saint-fondateur, attelé à la mosquée. Le gros de ce complexe mixte est constitué de salles de cours, laboratoires, bibliothèques, mais surtout d'un centre de recherche en médecine verte. Dr Khaled Mahmoud, un responsable, signale que l'académie accueille 3000 étudiants qui suivent aussi l'enseignement général avec une présence massive de filles, coiffées ou voilées, habillées en tailleur, blue-jeans, tuniques, etc. Ailleurs, à Haïfa, l'éducation à la paix est aussi une préoccupation de la confrérie Ahmadiya, vieille de 124 ans. Né en Inde, cet ordre soufi est suivi par 204 nations. "Tous les hommes sont égaux (...). Rencontrez-vous les uns les autres (...). La taqwa (crainte révérencielle) est la chose qui compte (…). 

Toute l'humanité est comme un seul homme", assène un des guides, devant une délégation religieuse du Sénégal. Elle comprenait Seydina Issa Laye Thiaw (Yoff), Mounirou Ndiéguène (Thiès), El Hadj Abdoulaye Niasse (Léona-Kaolack), Mouhamadou Habibou Hann (Omariens) et Mouhamed Fadel dit Serigne Fallou Dieng qui dirige le Cercle des intellectuels soufis du Sénégal. A l'invitation du Département pour le dialogue inter-religieux et la lutte contre l'antisémitisme au ministère israélien des Affaires étrangères, dirigé par l'ancien ambassadeur d'Israël au Sénégal, Gideon Behar, des représentants de khalifes sénégalais ont séjourné en Terre sainte (3-8 novembre). 

Ils ont rencontré juifs et arabes. "Le problème est dans l'éducation. Par exemple, comment soutenir la paix si on continue d'apprendre aux enfants arabes des chants de guerre appelant à la disparition d'Israël et de sa population", glisse Michel Gilboa Seban, un guide touristique. Il répondait à la remarque suivante: Pourquoi vend-on des jouets en pistolets dans les souks situés entre le Mur des lamentations, le Saint-Sépulcre et l'Esplanade des mosquées ? ===SUIVRA=== De leur côté, les arabes israéliens réclament des droits liés à la sécurité publique, à la dignité humaine, à la terre agricole, à l'habitat décent, à l'emploi salarié, à l'égalité citoyenne, brefs aux droits politiques, économiques et sociaux de l'homme. "Nous souhaitons la confiance entre tous les citoyens d'Israël", soutient Amir Assi, qui souligne par ailleurs l'existence d'un Centre des arts islamiques à Jérusalem. "Nous sommes fiers de notre minorité en Israël où nous exerçons librement notre liberté de croire et de parler." Cependant, le chemin reste pour gagner la confiance de tous ceux qui vivent sur une même terre, ajoute M. Assi, un descendant des "Arabes de 48", en référence à la création de l'Etat juif en Palestine, le 15 mai 1948. Ces Israéliens arabes sont aussi mal vus par leurs frères arabes. Prônant la voie de la sagesse venant du Sénégal, Seydina Issa Laye Thiaw plaide auprès des officiels israéliens pour le respect de ces droits réclamés par les arabes du pays, pour donner force à leur projet de promotion du dialogue interreligieux et de lutte contre les violences de tous bords. "La tolérance, c'est aussi que chacun puisse bénéficier de chances économiques et sociales sans discrimination. L'exclusion et la marginalisation sont source de frustration, et peuvent conduire à l'hostilité, au fanatisme, et alimenter l'intolérance", insiste-t-il. Devant des ambassadeurs d'Israël, le fils aîné du khalife général des Layènes rappelle la leçon coranique qui préconise le respect strict des lieux de cultes des juifs et des chrétiens. "Dans le Coran, relève-t-il, les monastères, les églises et les synagogues sont mentionnés comme des lieux de culte protégés par Dieu." Michel Gilboa Seban estime que pour vivre à Jérusalem, il faut s'armer de patience et de tolérance. "Il n'y a pas un autre endroit au monde où on a le plus besoin de ces deux vertus qu'en Israël", souligne-t-il, arpentant avec les visiteurs le sentier des prophètes menant au Mont des oliviers. Originaire d'Algérie et parlant français, anglais, hébreu et arabe, cet Israélien reste toutefois optimiste. "Dans les semaines à venir, on s'acheminera vers la fin des négociations (de Genève) pour aboutir à une solution au conflit qui dure depuis 70 ans entre les deux pays, Israël et les Palestiniens", annonce-t-il. Selon lui, la solution passe par Jérusalem avec un couloir international facilitant le libre accès à tous, mais aussi par le démantèlement des colonies. "Ça pourrait arriver dans les semaines à venir. Pourquoi ne pas aller à une fédération, puis une confédération avec la Jordanie ?", s’enthousiasme-t-il. ===SUIVRA=== Lundi dernier, les Palestiniens rejetaient tout accord intérimaire avec Israël dans les négociations de paix de Genève sous l'égide des Etats-Unis. Une première bouderie avait contraint la partie israélienne à céder sur l'autorisation de nouvelles colonies juives pour relancer le processus. "En l'absence de volonté politique de la part d'Israël pour prendre les négociations au sérieux, nous pensons qu'il vaut mieux ne pas parvenir à un accord que d'avoir un mauvais accord", affirmait le négociateur Mohammad Chtayyeh, membre de la direction de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP). Le secrétaire d'État américain John Kerry, qui a fait du processus de paix une des priorités de sa diplomatie, selon l'AFP, a effectué la semaine dernière une nouvelle mission au Proche-Orient sans parvenir à rapprocher les positions des Israéliens et des Palestiniens. "Aay Baaxul !" (Evitons les histoires), semble conseiller le diplomate israélien Gideon Behar, se confiant en langue wolof à la délégation sénégalaise. Il a loué chez les dirigeants du Sénégal, la réputation de pacifistes et l'abnégation dans la recherche de solutions de paix dans le monde. "On est tous des messagers, musulmans, chrétiens et juifs", rappelle Serigne Fallou Dieng. "Nous invitons tous à échanger. Ecoutons tout le monde pour avoir une société qui se normalise, individuellement et collectivement (…) reposant sur le savoir et la compréhension, le cœur et l'âme."

Auteur: aps
Publié le: Dimanche 17 Novembre 2013

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