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Marché monétaire de l’UEMOA : reflux des échanges mais éclaircie sur l’inflation

Auteur: Aïcha FALL

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Marché monétaire de l’UEMOA : reflux des échanges mais éclaircie sur l’inflation

En juillet 2025, le marché interbancaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine a enregistré une contraction significative des échanges, illustrant les tensions sous-jacentes d’un système bancaire en apparence solide mais confronté à une rareté de liquidité persistante.

Le volume hebdomadaire moyen des transactions est tombé à 774,1 milliards de francs CFA, enregistrant une baisse de près de 12 %. Le taux d’intérêt de référence a légèrement reculé à 4,80 %, et les taux débiteurs des banques ont suivi la même tendance, offrant un répit aux emprunteurs. Les dépôts à terme ont pour leur part été mieux rémunérés, tandis que l’inflation annuelle demeurait négative, à -0,9 %, soutenue par la baisse des prix alimentaires et contribuant ainsi à préserver le pouvoir d’achat des ménages.

Mais derrière ces chiffres rassurants, le secteur bancaire doit composer avec des contraintes croissantes. Les établissements thésaurisent des réserves largement supérieures aux exigences réglementaires, préparant le terrain face à l’incertitude régionale et internationale, à la hausse potentielle des prix alimentaires importés et aux risques liés à l’instabilité politique et climatique. Parallèlement, la demande de liquidités auprès de la BCEAO reste élevée, reflétant le besoin de sécuriser les financements et de respecter les ratios prudentiels, tout en anticipant de possibles acquisitions ou consolidations de filiales bancaires étrangères.

Cette accumulation de précaution a pour effet une certaine restriction du crédit au secteur privé. Les prêts aux entreprises et aux ménages progressent faiblement, peinant à suivre le rythme de la croissance économique régionale, tandis que l’exposition des banques aux emprunts publics augmente, accentuant le risque d’éviction du secteur privé. Certains pays de l’espace UEMOA, comme le Niger, subissent des coûts de financement beaucoup plus élevés que d’autres, créant des écarts qui compliquent la dynamique d’un marché monétaire censé être intégré et solidaire.

Au-delà des questions de liquidité et de taux, le marché interbancaire révèle également des enjeux de gouvernance et d’intégration régionale. La concentration des prêts vers certains États ou entreprises jugées sûres crée des déséquilibres et pourrait limiter la diversification des investissements, tandis que les mécanismes régionaux de mutualisation des risques restent insuffisamment exploités. Cette situation souligne l’importance de renforcer la coordination entre banques, régulateurs et gouvernements pour garantir que la dynamique monétaire serve l’ensemble du tissu économique et soutienne véritablement le développement inclusif au sein de l’UEMOA.

Parallèlement, les banques doivent composer avec la concurrence des États sur le marché monétaire. Les établissements privilégient souvent des prêts souverains jugés sûrs au détriment du secteur privé, ce qui peut freiner l’innovation et l’expansion des entreprises, en particulier les plus petites. Ce phénomène d’effet d’éviction pourrait accentuer les inégalités entre pays et secteurs, rendant la vigilance et une meilleure planification financière indispensables pour éviter que la stabilité apparente ne masque des fragilités latentes.

En dépit de ces tensions, la BCEAO maintient un cadre monétaire prudent, garant de la stabilité et de la résilience de la zone. Ce contexte met en lumière la complexité du paysage financier régional, où la rareté de liquidité, la stratégie de thésaurisation des banques et l’orientation des crédits révèlent un marché où anticipation et coordination sont indispensables pour soutenir l’activité économique et préserver l’intégrité du système bancaire.

Auteur: Aïcha FALL
Publié le: Mercredi 10 Septembre 2025

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