Cheikh Tidiane Youm : « L'industrialisation au Sénégal est le serpent qui se mord la queue »
En plénière, dans le cadre de l’examen du projet de budget du ministère de l’Industrie et du Commerce, le député Cheikh Ahmed (appelé Cheikh Tidiane Youm dans le titre) a alerté sur l’ampleur du défi industriel sénégalais. Saluant d’abord le parcours du ministre, « qui a fait ses preuves au niveau local », le parlementaire estime que le véritable test commence désormais « à l’échelle nationale », dans un secteur qu’il qualifie de stratégique pour l’avenir du pays. Mais dit-il : « l’industrialisation du Sénégal est un échec historique ». « Depuis les indépendances, aucun régime n’est parvenu à faire décoller ce secteur de façon durable », a-t-il affirmé. Le député rappelle que juste après l’indépendance, le secteur industriel contribuait à hauteur de 14% du PIB. Aujourd’hui, cette participation se situe entre 22% et 25%, soit à peine une progression d’une dizaine de points en plus de six décennies. Pour lui, ces chiffres traduisent « l’ampleur de la tâche » qui attend le gouvernement.
Une industrie largement contrôlée par des intérêts étrangers
Cheikh Ahmed a surtout mis en lumière la dénationalisation progressive du tissu industriel sénégalais. Il cite plusieurs exemples emblématiques. « Les Industries chimiques du Sénégal (ICS), dominées à 71%, la cimenterie Dangote, propriété d’un groupe nigérian, Sococim, filiale du groupe français Vicat, la Compagnie sucrière sénégalaise, aux capitaux majoritairement français ». « Une fois que ces investisseurs réalisent des bénéfices, ceux-ci sont rapatriés dans leurs pays d’origine. Une bonne partie de la richesse créée quitte donc le Sénégal », déplore-t-il. Ceci a fait que « malgré une croissance affichée parfois entre 6 et 8%, le pays ne pèse pas sur l’échiquier économique international et ne dispose pas de grandes entreprises capables de rivaliser à l’échelle mondiale ».
Face à ce constat, le député appelle à une rupture radicale et propose plusieurs leviers. La révision du cadre fiscal et douanier, la baisse du coût de l’électricité, la facilitation de l’accès au financement pour les PME, la promotion d’un véritable patriotisme économique, la mise en place de mécanismes de préférence nationale dans les secteurs stratégiques. « Il faut impérativement accompagner, encourager et sécuriser les capitaines d’industrie que nous avons aujourd’hui, et en créer d’autres. Ce n’est pas impossible » pense-t-il. Cheikh Ahmed conclut son intervention par une interrogation stratégique adressée au ministre : comment les incubateurs peuvent-ils permettre l’émergence de véritables capitaines d’industrie, et pas seulement de petites start-up technologiques ? Pour lui, sans un tissu solide d’industriels nationaux capables de défendre le secteur, il n’y aura ni lobby industriel, ni politique cohérente, ni environnement favorable au développement.
Commentaires (2)
L'industrie est le meilleur moyen de lutte contre le chômage de masse, le secteur tertiaire est amené à supprimer une multitude de poste avec le développement de L'IA.
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