Les conflits fonciers et les attributions controversées de terres à des intérêts privés se multiplient au Sénégal. Une nouvelle affaire éclate à Sébikotane, où un regroupement de collectifs citoyens dénonce le « silence inquiétant » des autorités face au projet de port sec porté par la société privée Holding Gueye SA, en plein cœur de la forêt classée de Sébikotane, patrimoine écologique national.

Les collectifs d’exploitants et de riverains de Dougar, Gandoul, Ndoukhoura et Dougar Potou dont le Collectif contre la Spoliation Foncière de Dougar (CSFD), expriment leur vive préoccupation face à ce qu’ils qualifient d’atteinte grave à la légalité et à l’environnement.

Illégalité du bail

Selon les collectifs, le projet d’exploitation de 115 hectares repose sur une base juridique inexistante. Le protocole d’accord signé avec la Direction des Eaux et Forêts est, selon eux, "juridiquement nul et non avenu.  

Aucune loi sénégalaise ne permet à cette direction ni à un partenaire privé d’autoriser la déforestation d’un site classé" affirment-ils.

Les collectifs poursuivent. « Malgré cette illégalité, Holding Gueye SA a déjà procédé à un vaste terrassement, détruisant une grande partie des arbres. Les exploitants riverains, eux, se voient refuser tout défrichement depuis des années », déplorent-ils.

Concertations biaisées et exclusions injustifiées

Le collectif accuse l’administration locale, notamment le sous-préfet de Diamniadio, de partialité dans l’organisation des réunions dites de concertation.

Le 21 octobre 2025, une réunion a été convoquée dans des conditions jugées inacceptables.  

« Les délégués du village de Gandoul, pourtant directement concernés, ont été expulsés de la salle. Les représentants des collectifs citoyens ont subi le même sort, malgré leur participation à une précédente rencontre en janvier », font-ils savoir.

Présence d’intérêts privés douteux

Les collectifs expliquent que le promoteur immobilier Abdou Ndiaye, non résident de la zone, a été convoqué. Ils l’accusent de bénéficier de deux autorisations de lotir illégales sur des parcelles du domaine classé, délivrées par la municipalité de Diamniadio, « juridiquement incompétente ».

Le collectif rappelle qu’un comité de pré-validation, réuni en septembre 2025, avait exigé une audience publique pour évaluer les impacts du projet. L’attitude du sous-préfet, en ignorant ces recommandations et en écartant les populations, est dénoncée comme un « acte de partialité manifeste en faveur de Holding Gueye SA ».

Des exigences claires et une mobilisation intacte

Les populations de Dougar, Gandoul et Ndoukhoura réaffirment leur mobilisation et formulent des demandes précises :

- La suspension immédiate du projet de port sec ;

- L’ouverture d’une enquête administrative et environnementale sur le bail de 25 ans et les autorisations de lotir ;

- Une réaction publique du Président de la République et de son gouvernement ;

- Le respect des lois sur le déclassement partiel, uniquement au bénéfice des besoins légitimes des populations riveraines.

Les collectifs concluent : « Le pouvoir ne peut pas condamner l’injustice d’un côté et la cautionner à Sébikotane. »  

Ils promettent d’utiliser tous les moyens citoyens et légaux pour défendre leur droit à un environnement sain, à la justice sociale et au respect des lois de la République.