[Rétro] Féminicides : 2025, l’année où les foyers sont devenus des cimetières silencieux
L’année 2025 s’achève au Sénégal dans un silence lourd, chargé de deuils, de colère et de questions restées sans réponses. Pendant que le pays s’apprête à tourner la page du calendrier, des femmes ont déjà tourné celle de la vie, arrachées à l’existence dans l’endroit même où elles auraient dû être protégées : leur foyer.
2025 restera comme une année noire. Une année où les violences faites aux femmes ont franchi un seuil inquiétant, où les féminicides se sont multipliés, transformant les maisons en tombeaux silencieux et le mariage, jadis refuge, en source de peur.
Jamais les violences basées sur le genre n’avaient semblé aussi fréquentes, aussi brutales et aussi banalisées. Selon ONU Femmes, une augmentation inquiétante des féminicides a été observée, installant un climat national particulièrement préoccupant.
Au Sénégal, les chiffres confirment l’ampleur du fléau. Une étude de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD), récemment rendue publique par le ministère de la Famille, de l’Action sociale et des Solidarités, révèle que trois femmes sur dix ont déclaré avoir subi des violences au cours des 12 derniers mois de l’année 2024.
Sur les cinq dernières années, 31,9 % des femmes ont été victimes de violences, un taux alarmant qui traduit la persistance et l’aggravation des abus. Plus encore, 70 % des femmes déclarent avoir déjà subi des violences au sein de leur couple.
« Trois femmes sur dix ont dit avoir subi des violences pendant les 12 mois précédant l’enquête », précise Rokhaya Diakhaté, directrice de la Famille. Cette étude a été conduite par l’ANSD avec l’appui des agences du système des Nations unies, notamment ONU Femmes. L’augmentation récente des cas de féminicides sonne comme un signal d’alarme : ces drames constituent des violations graves des droits humains qui ne peuvent plus rester sans réponse.
La fin de l’année 2025 a été marquée par une succession de drames qui ont glacé le pays.
Nogaye Thiam, quand un nom devient symbole national
Le nom de Nogaye Thiam a traversé le Sénégal comme une onde de choc. Cette jeune femme est décédée dans sa chambre, restant 48 heures sans vie tandis que son bébé allaitant se trouvait à ses côtés, sans assistance de sa belle-famille. Son décès a réveillé une douleur collective et une indignation profonde, mais surtout une vérité dérangeante : Nogaye n’était pas un cas isolé, elle était l’une parmi tant d’autres.
À Keur Massar : Le refus d’un rapport intime se transforme en condamnation à mort
À Keur Massar, le 14 décembre 2025, Mariama Ba, vendeuse de poisson et mère de sept enfants, succombe aux violences de son mari. Épuisée après une longue journée de travail, elle aurait refusé des relations intimes. Ce refus lui coûtera la vie. Rouée de coups par son époux, B. Fall, elle meurt des suites de ses blessures après son hospitalisation.
Binetou Guèye tuée par son mari lors d’une prétendue « plaisanterie » avec une arme à feu
Quelques jours plus tard, le samedi 20 décembre 2025 à Keur Mbaye Fall, l’horreur frappe de nouveau. Binetou Guèye, 33 ans, est tuée d’une balle en pleine tempe par son mari, P. M. Diop, lors d’une prétendue « plaisanterie » avec une arme à feu récemment acquise. Une maison ordinaire, une soirée banale, du thé, des rires... puis un coup de feu. Binetou meurt sur le coup.
Le décompte est macabre : trois femmes, trois foyers, trois vies brisées. Sans oublier Dieynaba Ndiaye, violemment battue par son mari, un jeune médecin, rappelant que la violence conjugale traverse toutes les couches sociales, sans distinction de statut ni de niveau d’instruction. Et une même question lancinante demeure : jusqu’à quand ? Derrière ces drames médiatisés, des dizaines de femmes anonymes continuent de souffrir en silence, battues, humiliées et terrorisées.
Les prisons dorées : l’autre violence invisible
Toutes les violences ne font pas la une. Certaines se vivent dans des maisons luxueuses, derrière des portails fermés. Des femmes que l’on croit privilégiées, entourées de confort matériel, se retrouvent privées de paix, de liberté, de respect et de dignité. Lorsqu’elles osent parler, on leur répond souvent : « Ton mari t’a tout donné, tu n’as pas à te plaindre ». Mais un foyer ne se construit pas sur l’argent. Sans respect, le reste n’est qu’une façade. Ces femmes souffrent parfois davantage, car leur douleur est niée, minimisée ou étouffée. Beaucoup meurent sans jamais avoir parlé.
Le mariage, de l’espoir à la peur
Dans l’imaginaire collectif sénégalais, le mariage est sacré. Il est censé protéger, sécuriser et construire. En 2025, pour de nombreuses jeunes femmes, il est devenu une source d’angoisse. Les traumatismes, les enterrements et les cris étouffés derrière les murs ont installé une peur profonde : « Et si c’était moi demain ? Et si l’homme que j’épouse devenait mon bourreau ? ». Quand une société en arrive à inspirer la crainte du mariage, c’est qu’elle a échoué à protéger ses femmes.
Un fléau mondial, une urgence nationale
La situation sénégalaise s’inscrit dans une crise mondiale. Selon l’ONUDC et ONU Femmes, environ 50 000 femmes et filles ont été tuées en 2024 par leur partenaire intime ou un membre de leur famille, soit 137 femmes par jour dans le monde. À l’échelle mondiale, 840 millions de femmes, soit près d’une sur trois, ont subi des violences physiques ou sexuelles au cours de leur vie. Malgré les engagements internationaux, les progrès restent dramatiquement lents.
Trop, c’est trop
Avant-hier Nogaye Thiam. Hier Mariama Ba. Aujourd’hui Binetou Guèye. Demain, ce sera qui ? Les femmes sont épuisées, étouffées par un poids qu’elles portent souvent seules. Le bilan de 2025 est macabre : des femmes tuées, d’autres violentées, des milliers réduites au silence.
Ce n’est pas seulement un problème de couples ou un problème de femmes. C'est un échec collectif. À l’heure de refermer l’année, une certitude s’impose : le silence tue autant que les coups. Le Sénégal ne peut plus attendre le prochain drame pour s’indigner. Il faut prévenir, protéger, écouter, sanctionner et agir. Car si rien ne change, les foyers continueront de se transformer en cimetières silencieux et les femmes en victimes oubliées d’une violence devenue trop familière.
Que cette année noire et meurtrière, où trop de sang a coulé, soit la dernière.
2026 : vivement une année de paix, de joie, de stabilité et de dignité pour toutes les femmes.
Commentaires (12)
Beaucoup de personnes iront en enfer à cause de leur comportement avec les belles sœurs ou belles filles mariées vivant dans les maisons familiales .
Discutez avec les femmes mariées vous très serez surpris d'entendre les mêmes discours .
Le cas de Nogaye a choqué plus que les autres . Pourquoi? A cause de la violence psychologique.
Il ne faut jamais s'attendre une réponse rationnelle bien pensée avec sagesse et respect qui tient compte du passé et de l'état des rapports que vous entretenez avec une femme qu'elle soit votre conjointe femme ou fiancée etc, quand une femme a les yeux , le cœuret ses vouloir ailleurs. Au contraire de l'homme, la femme répond à l'état conjoncturelle de ses émotions, besoins, vouloir et espoirs du moment sans faire fit du passé et des conséquences qui dérouleront de ses agissements et actes qu'elle est entrain de poser. Des actes dont elle agira avec des arguments vrais gênants de vous à sa connaissance ou simplement inventés de toutes pièces pour atteindre les objectifs qui l'obnibulent pour l'instant. Elle verra l'opposition à ses attitudes nouvelles ou le simple fait de la conseiller une idée contraire comme une adversité et une agression injustice à son égard qui cherche à lui ôter son bien être et agira férocement contre cela.
Toutes les femmes qui se sentent oppressées n'ont qu'à divorcer. La nouvelle génération a déjà pris le relais avec une belle mentalité. Elles travaillent, complètent leurs époux et font de très beaux enfants qui sont le fruit d'un amour sincère.
En tout cas, les hommes n'hésitent plus à divorcer pour épouser la nouvelle génération.
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